Crédit Lyonnais. Salle de conservation des titres.

Salle de conservation des titres du Crédit Lyonnais à Paris, là où se trouvaient très probablement des obligations de la Province de Québec. Carte postale d’avant 1909, collection Marc Vallières.

Le syndicat

Jusqu’au début de la Première Guerre mondiale, le gouvernement fédéral, les provinces et les grandes entreprises canadiennes doivent se financer en Grande-Bretagne, le principal marché international de capitaux de l’époque et l’ancienne métropole coloniale du Canada. La Banque de Montréal exerce un quasi-monopole dans ces opérations sur le marché britannique comme syndicat financier avec ses partenaires britanniques. Comme le gouvernement du Québec affronte de l’opposition à ses projets sur le marché britannique, il se voit contraint de trouver des solutions de rechange et innove dans les opérations de financement en utilisant les marchés français, américains et même québécois. Plusieurs syndicats financiers, y compris de grandes banques françaises comme le Crédit Lyonnais, entrent en concurrence avec la Banque de Montréal et certains courtiers locaux, comme Louis-Joseph Forget, font leurs premières armes dans le financement gouvernemental. À partir de la fermeture du marché britannique en raison du moratoire de 1914, les gouvernements et les entreprises canadiennes doivent se tourner vers les places financières américaines et canadiennes, de plus en plus capables de fournir les fonds, et où de nombreuses banques et maisons de courtage ont acquis l’expertise nécessaire pour diriger ou faire partie d’un syndicat financier. Dans le cas du gouvernement du Québec, la Banque de Montréal et la maison A. E. Ames & Co. de Toronto se positionnent alors en tête du syndicat financier pour un demi-siècle. Ce n’est pas un contrôle sans partage, car il arrive que des syndicats concurrents, notamment liés à la Banque Royale, parviennent à détrôner le syndicat dominant ou à s’y associer pour une certaine période. Dans les années 1940 et 1950, l’endettement du gouvernement québécois reste limité, ce qui restreint le pouvoir du syndicat financier, même si Hydro-Québec devient un emprunteur de plus en plus important. La Révolution tranquille marque le début d’une transformation radicale des opérations de financement du gouvernement du Québec et de ses institutions. À partir de ce moment, les sommes empruntées s’accroissent considérablement en volume et en fréquence, tant pour de grands projets comme la Nationalisation de l’électricité ou la construction de barrages d’Hydro-Québec que pour le financement récurrent du gouvernement et des sociétés d’État. Certains des projets controversés, telle la Nationalisation, suscitent des remises en question sur la place publique du pouvoir du syndicat financier surtout anglophone et au début des années 1970, d’un débat dans la presse à l’initiative de Jacques Parizeau. Une réforme du syndicat financier en 1978 vient ouvrir la porte toute grande aux banques et maisons de courtage francophones qui étaient devenues de plus en plus solides dans le marché.

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 Le Québec emprunte 

Syndicats financiers et finances gouvernementales, 1867-1987.


Disponible en librairie dès le 17 novembre prochain !

VALLIÈRE. Marc, Le Québec emprunte, Syndicats financiers et finances gouvernementales, 1867-1987, 2015.
VALLIÈRE. Marc, Le Québec emprunte. Syndicats financiers et finances gouvernementales, 1867-1987

Au moment où le débat sur l’ampleur de la dette publique du Québec fait rage, un regard rétrospectif sur les emprunts passés du gouvernement s’impose. Comment, en effet, a-t-il réussi à emprunter, année après année, des sommes considérables qui font maintenant partie de la dette accumulée? Marc Vallières étudie les opérations de financement, à court et à long terme, de la multitude d’emprunts réalisés de 1874 à 1987 par le ministère des Finances du Québec et Hydro-Québec. Si les banques et maisons de courtage organisées en syndicats financiers sont des partenaires incontournables de ces activités, exercent-elles un pouvoir occulte sur les politiques gouvernementales québécoises?

Publié aux éditions du Septentrion